Comme le dit l’autre mec, rien n’est jamais acquis à l’homme. Tout fort de mes heures de vol sans nombre en bus, la facilité à laquelle je me croyais rompu part en fumée comme une promesse de politicien, ou comme cette fumée du marché matinal à Zhaoxing.

Il faut que je me rende au pont de Chengyang (Tcheung-yang, 称阳), via la ville de Sanjiang (San-ts’iang, 三江), ville « des trois fleuves ». J’attend le bus au milieu des commerçants en plein marché.

Mais soudain les deux bus de 8 et 9 heures n’existent plus, et me voilà en rade sur la grand’rue de Zhaoxing, voyant passer les heures à discutailler avec les commerçants du marché…

Enfin je hèle un bus pour Diping, et me voici sur la route de Sanjiang.

Et là c’est le nœud gordien. Comprenez que Diping est certes sur le chemin de Sanjiang, mais qu’elle est sise sur une rivière et qu’un pont sépare les deux rives, trop fragile pour qu’un bus y passe… On nous débarque. Je traverse le pont, pensant trouver une sorte de gare routière de l’autre côté. Naïveté ! Des motards m’expliquent fort obligeamment qu’aucun bus ne part de Diping, et qu’en vérité la meilleure solution est de recourir à leurs services : pour 20 kuai, ils me déposent au carrefour suivant où, me disent-ils, « les bus sont bien plus nombreux ».

Comme d’habitude avec un Chinois qui a quelque chose à vendre, je ne fais pas confiance, et comme d’habitude quand je me défie d’une situation, je file acheter des clémentines. Le temps d’alourdir mes poches d’une demi-douzaine de clémentines de Tsong-ts’iang, et comme je retraverse le pont j’avise un bus sur le départ. Je cours et le happe au vol. Oui, il va à San-ts’iang. Les Chinois me fatiguent.

Et en fait non, il n’y va pas. Après une demi-heure de route, tous les passagers descendent du bus d’un même mouvement, aussi naturel pour eux que mystérieux pour moi, marchent cent mètres dans le village, traversent un pont de bois et montent dans un autre bus qui les attendait et dont vraisemblablement les passagers ont emprunté le trajet inverse du nôtre. C’est sûr que c’est drôlement plus simple que de remplacer un pont de cinq mètres en bois par un pont de cinq mètres en béton.

Arrivé à la tumultueuse San-ts’iang, descente de bus, traversée du fleuve, changement de gare routière, montée en bus et départ pour le pont de Chengyang.

Nous y serions arrivés sans encombre, j’aurais seulement pensé que les Chinois de cette contrée avaient un problème avec les ponts. Ils semblent en fait qu’ils aient un problème avec les transports en général.

A mi-route, arrêt brusque. Devant nous, une file indienne (chinoise ?) de voitures et de camions s’étire ininterrompue, à perte de vue. Le chauffeur coupe le moteur. On me dit que cela doit être à cause d’un accident. Je descends voir.

L’accident en question, c’est une mobylette percutée par une camionnette. Bilan sur une route de campagne peu fréquentée : 1 km de bouchon. Je me demande ce qui arrive lorsqu’un vrai accident se produit. La Chine arrête de rouler pendant une heure ?

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