Jeudi 8 avril

Beau trajet vers Lijiang ; les champs sont noirs de monde. Dessin de leur bordure, géométrie de grande échelle. Zones de patchwork, où les aires des champs sont rayées de l’alternance 50-50 des bandes cultivées et des voies d’irrigation pleines de soleil.

Lijiang aussi touristique qu’on s’y attendait. D’un coup nous expédions nos emplettes : écharpes de soie, calligraphie, cartes postales…

Lijiang : le passé est le futur de la Chine.

« Les peuples heureux n’ont pas d’histoire » : quid de la Chine ?

Belle route de nouveau pour Shangri-la (anciennement « Zhongdian », rebaptisé philanthropiquement…) : ascension sinueuse vers des sommets enneigés.

Là, mal de tête léger. Pléthore de british blonds, sac-à-dos à dos.

Vendredi 9 avril

Shangri-la existe, je l’ai rencontré ; mais pas ici. Sur la route de Lijiang à Zhongdian – une vallée et sa rivière, des rizières vertes et ensoleillées, pas d’agitation. Qu’est le Shangri-la rêvé des Chinois ? Sans doute bien différent du nôtre : industrieux ? animé ? organisé/réglé ? une autre notion de l’harmonie ?

Visite au monastère de Songzanlin, prix éhonté. Versailles commence aussi par une billetterie.

Chemin de ronde autour du lac devant le monastère: « respectez les religions, attention sol glissant. »

Monter, toujours monter… Les Chinois savent-ils descendre… ? Beauté de la descente, comme Stendhal qui dit-on trouvait du génie dans la manière d’une femme de descendre de voiture.

Office bouddhiste. Aux murs, des fresques chagalliennes. Travées de larges bancs coussinés où s’accroupir. Moines sur ces travées, face-à-face en rangs.

Un borborygme qui se répète, à peine psalmodié. Clochettes. Voix rauques, égrotantes des moines, des moinillons, interrompues de leurs raclements de gorge. Peu de conviction, peu de ferveur. Les diseurs se balancent en rauquisant.

A un coup de tambour, tous les plus jeunes sortent. Puis rentrent à nouveau. D’autres déjeunent dans une salle latérale.

Deux touristes Han : elle lui passe son Nikon, et hop trois prosternations. Pratique efficace du culte.

Sur la rotation: les Hans font tourner ce monastère, font tourner la Chine. Au centre de Shangri-la, au sommet d’une petite colline, contigu au temple sommital de rigueur, un moulin à prière géant. Deux petites filles (tibétaines?), dont les mères montent laborieusement l’escalier en répétant leurs prières à chaque marche, essaient de le mettre en mouvement. Je me fais leur bras. Dans son inertie, l’immense moulin aux dorures et svastikas tourne un long temps.

Cartes postales rédigées, c’est le tour des emplettes (boite à bijoux en corne de yak, vase craquelé à dragon bleu sur fond blanc…). Pesant mal de tête. L’avion décolle à 21h40. En attendant, deux chocolats chauds (vanille pour Papa, caramel pour moi) au Noah café.

A Kunming, l’hôtel donne sur le périph. Vacarme ; je dors dans la salle de bain. Fin de mes 23 ans.

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