Je me retrouve à l’instant dans les rues de Pékin, et j’ai l’impression de revenir de loin, changé, mais je ne reviens pas de très loin. Je me demande comment faire le récit (« réciter »?) de ce voyage.

Option 1: Je crée un blog « Psychanalyse du dragon » (sous-titre: « si l’oncle Sigmund avait eu les yeux bridés »), et je dissèque les difficultés de l’esprit français à apprécier les belles choses que nous avons vues – coupable : ce souci de chercher partout la petite bête.

Problème: depuis quand un blog est-il fait pour raconter sa vie.

Option 2: Je crée un blog « Le ballon jaune » (sous-titre: « un milliard quatre de footballeurs »), et je rapporte le match entre les manières de voir chinoise et française.

Problème: je suis nul en foot, et d’ailleurs je ne suis pas sûr que cela nous console des (més)aventures de notre équipe préférée.

Option 3: Conformément à ma promesse de soit me faire moine, soit ramener plein de cadeaux (qui a dit que les promesses étaient faites pour être tenues?), je crée un blog « Le moulin à prière » (sous-titre: « sutras, mantras et vieux fatras »), et je ne parle que de bouddhisme.

Problème: j’ai pas envie de bouddher. Enfin, pas maintenant.

Du coup, comment relater:
– 2 provinces en 9 jours
– 2 Chinoises un peu françaises (mais pas trop) et 2 Français un peu chinois (mais pas trop)
– une demi-douzaine de monastères (tout-à-fait authentiques pour certains, presque authentiques pour d’autres)
– 387 moines (dont 3 beaux gosses)
– 2 nonnes
– 3000 mètres d’altitude (et des pousssières)
– 20 heures de car (et des poussières aussi)
– 1 prairie (avec ses yaks officiels)
– 18 bols de nouilles épicées (par personne)
– 1284 moulins à prière mis en rotation
– 14 vieilles dames doublées en mettant en rotation les 1284 moulins à prière
– 2 raviolis tibétains (enfin, 1 et demi plutôt)
– 20 photos avec des yaks (bien poilus)
– 2900 photos sans yak (estimation en cumulé)
– 2920 photos sans Lamborghini
– 1 promenade en Normandie (sans fromage)
– 28 expressions chinoises à ne pas mettre entre toutes les mains
– 14 bracelets achetés et ramenés pour la mystérieuse Vannina
– 1 chapeau noir (vive les Bretons)
– 1 chapeau rouge (vive les Bretons aussi)
– 1 short blanc en lin détruit (on m’avait prévenu)
– 1 自然羊肉 excellent (et 2 pas top)
– 1 hôtel avec division par 7 du prix de la chambre (on est 浪漫 ou on ne l’est pas)
– 1 chauffeur excédé par nos retards (on est 法国人 ou on ne l’est pas)
– 6 bracelets bénis par le moine (on ne sait jamais, ça peut toujours marcher)
– 1 baignoire pleine d’eau noire (se laver nuit à la santé)
– 4 Grannies (parce que c’est bon)
– 12 ampoules aux pieds
– 1.3 coups de soleil (l’arrière des mollets compte pour 0.1)
– 1 blessure dramatique à l’index droit, juste là où on saisit la b(r)aguette
– 6 压瘪饺子 engloutis (« raviolis écrabouillés »)
– 1 réflexion super intelligente (je ne sais plus qui l’a dite)
– 1 vieille dame sur la montagne, 鹤发童颜 comme on dit vulgairement: « cheveux (blancs) comme une grue, couleurs (vives) comme un enfant ».

Alors pour résumer tout cela, je vous propose des flashs, comme ceux qui saluent l’automobiliste à 180, et comme ceux qui matraquent les statues de bouddhas au passage des groupes de touristes.

Mais tout d’abord, comme il se fait tard et que j’ai deux lessives sur le feu, j’enfourche mon vélo dans le soir pékinois et j’écume les ruelles fourmillantes.

Un instant, j’oubliais (quand on donne un titre débile à son article, il faut assumer): qui tombe à l’eau?

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