Suis-je bien en Afrique? C’est la question que je me pose depuis mon arrivée à Kigali avant-hier… Les routes sont toutes propres et les feux de circulation sont respectés dans le centre-ville; il n’y a pas de gros rires ni de grands rassemblements sonores; on ne voit pas d’effusions ou de grandes embrassades…

Autour des hôtels de la conférence à laquelle j’assiste, la sécurité est maximale. Des soldats armés lourdement à chaque coin de rue, de multiples barrages routiers et contrôles de sécurité…

Et partout ce sentiment d’un non-dit, derrière l’amabilité de l’accueil.

Mémorial du génocide

Le principal point touristique de la ville est le Mémorial du génocide: à flanc de colline, des dalles de béton qui scellent des fosses communes, des jardins fleuris, une maisonnette qui abrite un musée.

A l’intérieur: la nudité des faits – en faisant abstraction du pathos, du fait que ce sont les vainqueurs écrivent l’histoire, et du sens du temps qui nous donne l’avantage de juger nos prédécesseurs. Malgré tout cela, cette nudité des faits est terrifiante.

Quelques rapports alarmés précédent le drame, mais rien qui annonce l’horreur et la rapidité du génocide.

En 1994, en trois mois, 800 000 morts, selon une mécanique préparée de longue date. A comparer aux 10 millions d’habitants de l’actuel Rwanda.

L’horreur inexplicable

Aucun événement historique (Verdun, l’holocauste…) n’atteint cette fulgurance de la mort. Et même s’il apparaît, à présent, que le Génocide à fait l’objet d’une préparation approfondie, comment se convaincre que c’est possible? Autant on peut concevoir que des gouvernements s’appuient sur une mécanique étatique bien organisée pour commettre leurs forfaits, les militaires faisant la mise à mort, autant ici les atrocités furent partagées entre tous: comment?

Et comment passer l’éponge, une fois que l’armée tutsi (réfugiée temporairement en Ouganda) à repris le pays et chassé les forces hutus, que Kagame à été élu à la présidence avec 95% des voix, qu’un tribunal international à été mis en place? Des « Gacaca » (tribunaux traditionnels) sont créés et reçoivent une formation juridique élémentaire; à eux tous ils jugent près de 2 millions de cas.

Toujours ce malaise en traversant Kigali, et ses collines souriantes. Peut-être parce que tous ceux que je croise ont vécu les événements, et font comme si de rien n’était?

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